Financement du logement social : une vision apocalyptique

La Libre et la RTBF se penchent presque simultanément sur le drame financier que vivent la Région bruxelloise et les sociétés de logement social. Sous l’angle budgétaire, c’est la panique à tous les étages. Il n’y a plus d’argent pour rénover 37.000 logements sociaux, mais toujours la volonté d’en construire 200 sur l’un des derniers champs de la Région.

Selon La Libre, la Région bruxelloise doit rénover près de 37.000 logements sociaux. Le budget estimé est de 900 millions d’euros sur 10 ans. Mais ce montant, selon plusieurs directeurs de sociétés de logements sociaux (SISP), sera largement insuffisant. L’inflation et l’explosion du prix des matériaux sont passés par là. A cela s’ajoute désormais l’indexation des salaires du personnel des SISP, qui manifestent désormais pour une revalorisation salariale.

Pour les directeurs des SISP, « Avec ces hausses, sur 10 ans, on ne pourra pas faire tous les projets imaginés ». La RTBF donne un exemple pratique de l’explosion des prix : le directeur de la SISP Comension explique que la rénovation en profondeur de son parc social était estimée à 51 millions d’euros sur 10 ans. Mais « selon ses calculs », il faudra désormais y ajouter 68 millions pour boucler le budget.

Augmenter les loyers ? Revendre des biens ? Demander plus d’argent à la Région ?

Selon les directeurs des SISP, une piste est l’augmentation des loyers et /ou l’obtention d’argent supplémentaire de la Région. ”En résumé, nos coûts augmentent tandis que nos revenus baissent » résume Aziz Sopi, directeur général d’En Bord de Soignes. Cette SISP (dont fait partie Woluwe-Saint-Pierre) était en perte de 500.000 euros en 2021, et de 840.000 euros en 2022.

Aziz Sopi se dit favorable à la revente de certains logements, et à l’augmentation des loyers. En revanche, pour Raphaël Jehotte, président de la SLRB, il n’est « pas question de vente de patrimoine”.

Bref, un catastrophe financière qui n’empêche pas la Commune de se battre pour construire 200 logements sur le champ des Dames Blanches tellement enclavé que la seule avenue des Dames Blanches ne pourra pas supporter l’augmentation de trafic.  

« Les difficultés financières sont généralisées dans les SSIP à Bruxelles », pointe pour sa part Etienne Dujardin, conseiller communal (MR) administrateur de la SISP En bord de Soignes. « Les règles, notamment financières, imposées par la tutelle, empêchent les sociétés de logement de faire leur travail, de rénover les logements vides rapidement. Il y a des milliers de logements publics vides à Bruxelles faute de rénovation et des milliers d’autres à rénover d’urgence.« 

On verra après les élections

La Libre rapporte encore que, de son côté, le cabinet de Nawal Ben Hamou (PS), Secrétaire d’État au Logement se dit « conscient du fait que les moyens actuels ne pourront pas suffire pour la rénovation de logements et l’acquisition de logements » et reconnaît les difficultés budgétaires de la Région. Un groupe de réflexion sur le sujet présentera ses conclusions en fin d’année. Mais le cabinet prévient déjà : c’est le prochain gouvernement désigné en 2024 (si tout va bien) qui prendra sa décision à propos de la politique du logement. Et donc des priorités en la matière.

Harcèlement politique pour construire sur le champ

Face à cette description apocalyptique, la conclusion est simple : les finances publiques ne suffisent déjà plus à entretenir le parc immobilier social. 37.000 logement doivent être rénovés… mais la Région et la Commune de Woluwe veulent à tout prix supprimer le champ des Dames Blanches pour y construire 200 logements. A ce niveau, ce n’est plus de la politique, c’est du harcèlement.